Eh bien non !

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Ophrys-bourdon_1_1080-768x1024.jpg.

Cette famille de plantes remarquées dès la plus haute antiquité par les Aztèques qui utilisaient la vanille, est représentée en Europe par de nombreuses espèces qui n’ont rien à envier aux coffrets, tiges coupées ou pots exigus des fleuristes. Les Grecs ont tiré son nom du mot « orchis » qui signifie testicule, vu la forme de ses deux tubercules ? La poudre aphrodisiaque qui en était extraite aurait même permis d’engendrer des garçons à coup sûr.

Abandonné depuis peu en France méridionale, le salep, poudre de bulbes séchés, très nutritif, est encore consommé en Turquie.

Nous dirons donc que c’est une famille de plantes quelquefois parfumées, locales bien souvent, qui peuvent être économiques et demeurent d’essence masculine.

Les 27 000 espèces connues dans le monde se sont différenciées tardivement, après les autres plantes et avec les insectes, ce qui n’a pas été sans incidence :

  • En effet, si elles ont pu utiliser au mieux les insectes pour leur fécondation, elles ont dû se contenter des milieux marginaux non encore conquis par les autres végétaux. Elles apparaissent donc dans les endroits trop secs ou trop humides, trop chauds ou trop froids, même en haut des arbres dans les forêts denses intertropicales. Certaines ont réussi l’exploit de se passer de soleil et par là même de chlorophylle en se nourrissant de feuilles mortes en décomposition. Rien d’étonnant, dès lors, à ce que cette fleur nationale du Venezuela s’épanouisse au cœur de la Lorraine, à quelques pas de nous.
  • Toutes nos belles fleurs sont des balises indiquant à l’insecte que, moyennant le transport de quelques grains de pollen, il trouvera table mise. Beaucoup d’orchidées se servent ainsi des insectes en sécrétant dans un tube, appelé éperon, un succulent nectar. La fleur est conçue en véritable piste d’atterrissage repérable par certains insectes seulement et la profondeur de l’éperon ne permet qu’à quelques espèces d’atteindre le nectar. N’a-t-on pas trouvé une orchidée munie d’un éperon de 30 cm et le papillon (sphinx) associé, équipé d’une trompe de la même longueur ?

Dès lors, la plante et l’animal sont indissociables, la mort de l’un entraînant la disparition de l’autre.

Dans notre région, nous trouvons beaucoup mieux : le genre Ophrys imite les femelles d’insectes jusque dans leur émission d’odeurs attractives pour les mâles qui s’y laissent prendre de fleur en fleur ; le pollen ne saurait avoir convoyeur plus motivé.

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Epipactis-rouge_Epipactis-atrorubens_3391-683x1024.jpg.

Après fécondation, les graines de l’orchidée se développent et mûrissent. Elles comptent parmi les plus petites au monde (entre cinq et dix millionièmes de gramme). Elles compensent ce manque de réserve par leur grand nombre : plusieurs centaines de mille pour une plante, ce qui permettrait à cette plante de couvrir la terre en quatre générations. Beaucoup sont entraînées par le vent dans des endroits défavorables. Celles qui atterrissent dans une station propice ne peuvent germer sans l’intervention d’un champignon qui va conditionner tout le développement de l’orchidée. Il faudra plusieurs années de la germination à la première floraison.

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Ophrys-abeille_1_1080-1024x767.jpg.

Les plus proches de nous s’épanouissent dans les pelouses naturelles. Leur petite taille est un handicap dans la course à la lumière ; leur cycle pluriannuel les rend dépendantes de toute variation du milieu qui les héberge. La destruction des grands herbivores (chevaux, bisons, aurochs, cerfs, etc.) a permis le développement continu de la forêt jusqu’à la limite des terres agricoles. L’introduction de résineux étrangers a accéléré la colonisation forestière des coteaux arides. Dans la vallée de la Moselle, comme dans toute la Lorraine, les orchidées ont dû se réfugier dans les prairies entretenues par les animaux domestiques. Elles sont menacées par l’évolution des techniques agricoles : abandon du pâturage, extension des labours, enrésinements…

Il nous appartient de leur laisser un refuge afin de les transmettre à nos petits enfants.

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Ophrys-litigiosa_4631_1080-683x1024.jpg.

Dès le mois de mars, vous pourrez les rencontrer, peut-être même sur le talus de la route. Elles n’en méritent pas moins le respect. Admirons-les et propageons que la plus belle fleur sauvage ne valorise pas l’ignorant qui la cueille.

Rappelons qu’elles sont souvent protégées par la loi et qu’il est vain de les transplanter, ce à quoi elles ne survivraient pas.

Claude ROBERT